Les enfants juifs recueillis par l'Assistance publique de Paris sous l'Occupation (1940-1944), par Antoine Rivière

Photographie d'archive. Sur les routes de l'exode. Mai-juin 1940

Le 4 juillet 1942, Pierre Laval propose la déportation des enfants juifs de moins de 16 ans. En France, la mise en œuvre de la solution finale par les Allemands, à laquelle l'administration française se prête, coûtera la vie à près de 11 000 enfants. Des individus et des institutions s’engagent dans la voie périlleuse de sauver des enfants juifs. L’Assistance publique de Paris a-t-elle contribué à cette « résistance de sauvetage » ?
Antoine Rivière, Maître de conférences à l’Université Paris 8, lève le voile sur son histoire méconnue.

Résumé

Entre 1940 et 1944, plusieurs centaines d’enfants juifs ont été recueillis par le service des Enfants assistés de l’Assistance publique de Paris. Fils et filles d’immigrés d’Europe de l’Est, ils étaient pour la plupart issus des populations juives les plus vulnérables de la capitale. Leur admission à l’Assistance publique a ainsi presque toujours eu lieu sur fond de pauvreté, mais la politique antisémite de Vichy et de l’occupant nazi en a été dans bien des cas la raison décisive. Il est aussi arrivé que certaines familles aient fait le choix délibéré d’abandonner leurs enfants dans l’espoir de les sauver. Recueillis par l’Assistance publique, ces enfants ont été semble-t-il relativement épargnés par les persécutions, contrairement à leurs proches. Cela tient principalement à ce que les autorités de l’époque n’ont pas mené de traque systématique parmi les enfants assistés. La seconde explication est sans doute que l’administration parisienne a traité ces enfants juifs comme les autres enfants, et qu’à la campagne, auprès des nourriciers à qui elle les avait confiés, ils ont bénéficié d’un relatif anonymat parmi les autres pupilles de l’Assistance. Au lendemain de la guerre, cette uniformité de traitement a pu créer des situations ressenties comme iniques, lorsque les règlements et la culture de l’institution ont empêché des retrouvailles familiales ou condamné certains enfants à vivre dans l’ignorance de leur histoire.

Bibliographie 

  • BURRIN, Philippe, La France à l’heure allemande, 1940-1944, Paris, Le Seuil, 1995. 
  • KLARSFELD, Serge, La Shoah en France, 4 volumes, Paris, Fayard, 2001. 
  • POZNANSKI, Renée, Être juif en France pendant la Seconde Guerre mondiale, Paris, Hachette, 1994. 
  • RIVIÈRE, Antoine, «Des pupilles ordinaires. Les enfants juifs recueillis par lAssistance publique de Paris sous l’Occupation (1940-1944)», Revue d’histoire de l’enfance «irrégulière», 19, novembre 2017, Presses universitaires de Rennes, p.87-117. 
  • WASERSCZTAJN, Charles, Sauvé d’Auschwitz par l’Assistance publique, Orléans, Éditions du CERCIL, 2016.

Biographie

Antoine Rivière est historien, maître de conférences à l’Université Paris 8. Il est spécialiste des enfants, des femmes et de la famille ainsi que des politiques sociales à l’égard de l’enfance et de la jeunesse à l’époque contemporaine. Ses travaux portent notamment sur l’abandon d’enfants et sur l’Assistance publique de Paris.

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